Dans l’objectif d’Henry Viollet. Les monuments islamiques à travers un fonds d’archives inexploré (1904-1913) - exposition
Henry Viollet (1880-1955) a été une figure pionnière des études sur le patrimoine bâti islamique. Découvrez une partie de la riche documentation qu'il a rassemblée au cours de ses missions au Moyen-Orient (1904-1913) : photographies, carnets de voyages, notes archéologiques, travaux préparatoires...
Commissariat
Martina Massullo, chercheuse en résidence (Centre de recherche sur le monde iranien, CeRMI – UMR 8041) et Farzaneh Zareie, chargée de collections pour le domaine persan (CNRS, CeRMI / BULAC). Avec la collaboration de Sandra Aube, chargée de recherche au CNRS (CNRS, CeRMI – UMR 8041) et Marine Fromanger, experte en instruments et documents scientifiques d’Occident et d’Iran (Compagnie Nationale des Experts).
Cette exposition est réalisée dans le cadre de la résidence de recherche « EpiPOM - Épigraphie du Proche-Orient médiéval. Le patrimoine architectural en pays d’Islam dans le fonds iconographique Henry Viollet », soutenue par le GIS CollEx-Persée (septembre 2021 - août 2022).
Bande-annonce et visite guidée
Présentation de l'exposition
Passionné d’architecture des premiers siècles de l’Islam, l’architecte Henry Viollet (1880-1955) est mandaté par le ministère de l’Instruction publique et des Beaux-arts pour conduire plusieurs missions en Irak et en Iran. Il sillonne l’Orient pendant neuf ans (1904-1913), ses expéditions le conduisant de l’Égypte à l’Ouzbékistan actuels. Il rapporte de ses voyages un nombre important de photographies, de notes et de croquis. Cette riche documentation témoigne de ses découvertes archéologiques pionnières et de son parcours, inédit pour l’époque, autour des monuments les plus significatifs du patrimoine bâti islamique qu’il cherchait à documenter avec minutie pour retracer « les origines de l’art musulman ».
Parmi cette imposante iconothèque se distinguent des prises de vue ou des relevés particulièrement anciens d’édifices aujourd’hui disparus, complètement transformés ou difficiles d’accès. Outre l’architecture, des scènes de vie montrent aussi l’intérêt historique et ethnologique que ces lieux et leurs habitants exerçaient sur le jeune architecte, accompagné dans ses voyages par sa femme, Madeleine. En retraçant leur chemin d’Alep à Baghdad, et au-delà jusqu’à Ispahan et Samarcande, ces documents montrent tout l’enchantement, mais aussi la complexité et les péripéties d’une telle entreprise.
L’exposition se déploie autour du noyau constitué par les images de ces expéditions réalisées au tournant du XXe siècle : des tirages au gélatino-bromure d'argent originaux, des carnets de croquis et des relevés d’architecture, mais aussi des journaux de route manuscrits, dont les thèmes sont remis en contexte scientifique et patrimonial. La Première Guerre mondiale interrompt à jamais les activités de Viollet sur le terrain. Cependant, il se consacre à la publication de quelques résultats préliminaires de ses recherches. Des travaux préparatoires liés à ces publications sont également exposés. L’enjeu est de montrer l’ampleur et la richesse d’un fonds protéiforme, aujourd’hui déposé à la BULAC, qui a encore beaucoup à révéler.
Chronologie
- Henri Marie Victor Viollet (Henry Viollet) est né à Paris le 13 février 1880 et décédé à Châtillon-sur-Seine le 3 juin 1955.
- 1901 : inscription à l’École des Beaux-Arts de la ville de Paris
- 1904 : premier voyage vers le Moyen-Orient
- 2 novembre 1904 - 26 mars 1905 : voyage en Égypte et au Soudan
- 28 décembre 1911 : diplômé de l’École des Beaux-Arts, section architecture
- Août 1906 - septembre 1907 : première mission officielle en Mésopotamie
- Octobre 1907 - décembre 1908 : deuxième mission officielle en Mésopotamie accompagné de sa femme Madeleine Besnard
- Février - décembre 1910 : troisième mission officielle en Mésopotamie accompagné de sa femme et de André Godard
- 1910-1913 : architecte en chef des services d’architecture et de voirie de Bagdad [en alternance avec André Godard]
- 27 décembre 1911 – 23 avril 1912 : première mission officielle en Perse, rattaché à la Délégation scientifique française dirigée par Jacques de Morgan. H. Viollet voyage avec Jean de Moustier
- 19 mai – 28 décembre 1913 : deuxième mission en Perse, accompagné de sa femme
- 1920 : nommé architecte en chef des Régions libérées dans l’Oise
- 7 mai 1921 : croix de guerre 14-18, chevalier de la Légion d'honneur
- 1937 : chargé du projet de construction du Pavillon de l'Iran à l'Exposition internationale de Paris [le projet ne sera pas réalisé]
- 1950 : nommé architecte en chef de la Côte d’Or
Exploration en Égypte et au Soudan
novembre 1904 - mars 1905
Pour sa première expédition, Viollet visite rapidement l’Égypte puis se rend à Khartoum, au Soudan. Au cours de ce voyage, il effectue environ 200 clichés photographiques, pour la plupart des portraits de la population. Il réalise également des dessins aquarellés de paysages qu’il observe sur son chemin. Les photographies de cette série sont parfois annotées de sa main.
Première mission en Mésopotamie : d’Alep à Bagdad à cheval
août 1906 - septembre 1907
Le 28 juillet 1906, Viollet part de Marseille en bateau. De Beyrouth, il prend le train qui le conduit vers Damas, puis demeure quelques jours à Alep afin de former sa caravane pour Bagdad. Son projet est de rejoindre cette ville en longeant l’Euphrate à cheval en 28 jours. Ce long chemin est marqué par la visite de différentes villes : Maskanah, Raqqa, Mayadine et ensuite Anah, al-Haditha, Hit, al-Ramadi et al-Fallujah.
Cette première mission officielle de Viollet a pour but d’effectuer des recherches archéologiques sur les monuments de l’époque abbasside (750-1258), mais Viollet concentre plutôt son attention sur la ville de Bagdad. Tout au long du voyage, il prend des photographies qu’il développe sur place, grâce à un équipement qu’il a emporté avec lui. À son retour à Paris, il rédige un article publié en octobre 1907 dans Le Monde illustré.
Le voyage d’Alep à Bagdad, la ville des khalifes, la reine de l’Orient, sans offrir des grosses difficultés reste encore assez aventureux.
Henry Viollet
Samarra, une découverte majeure
octobre 1907 - décembre 1908 ; février - décembre 1910
Accompagné de sa femme Madeleine, Viollet se rend sur le site de Samarra, ancienne capitale du califat des Abbassides, une première fois en 1908, puis en 1910. Il se consacre à l’étude de la mosquée d’Abu Doulaf édifiée par le calife al-Mutawakkil en 860 et aux ruines du palais de Dar al-Khilafa situé sur la rive gauche du Tigre. Secondé par André Godard, il conduit les premières fouilles du site archéologique et recueille plusieurs fragments de décoration architecturale en marbre et stuc. Un journal de fouilles décrit cette courte mais importante campagne archéologique. À son retour en France, en 1911, Viollet publie les résultats préliminaires de ces recherches.
De Bagdad je fis, en mars 1908, un premier voyage à Mossoul en passant par Samara, Aboudalaf, Tekrit, Dor. Puis je retournais quelques mois après à Samara où je séjournais alors quelques temps, campé au milieu des ruines.
Henry Viollet
Les missions en Perse : une archéologie du disparu
décembre 1911 – avril 1912 ; mai – décembre 1913
Fraîchement diplômé de l'École des Beaux-Arts, Henry Viollet parcourt une grande partie de la Perse accompagné du comte Jean de Moustier. Un an plus tard, il retourne dans le pays accompagné de sa femme et dessine un itinéraire comprenant environ une centaine d’étapes, dont un grand nombre de villages aujourd’hui disparus. La route est effectuée en caravane ou en voiture hippomobile. Il s’intéresse aux sites situés près de la mer Caspienne, au nord du Khorasan et à la frontière afghane et étudie les monuments qu’il rencontre tout au long de son parcours, jusqu’alors très peu explorés. Il effectue 932 clichés. Parmi les édifices disparus documentés figurent la citadelle d’Ispahan (Kal-eTabarak, 1037), la mosquée de Kashan (1074) avec son remarquable mihrab en stuc, ou la célèbre mosquée de Khargird datant du XIe siècle. C’est pendant la première de ces deux missions que Henry Viollet dévoile l’une des mosquées les plus anciennes d’Iran, la mosquée de Nā’in (960), découverte majeure dans l’histoire de l’archéologie monumentale en Perse.
Me voilà de nouveau reparti vers de nouvelles régions inconnues, et dans des conditions nouvelles pour moi. Après le voyage seul, les délicieux voyages avec ma femme, puis le voyage à trois, et enfin cette fois le voyage avec un étranger.
Henry Viollet
Les numérisations des négatifs sur plaques de verre du fonds Henry Viollet sont disponibles sur la BiNA et sur Internet Archive.
Sélection bibliographique
En parallèle de l'exposition, découvrez, à partir d'une sélection d'ouvrages disponibles au prêt, le riche patrimoine architectural en pays d'Islam, ainsi que les points de convergences et d'échanges entre les civilisations ayant contribué à l'essor de l'art islamique.
Colloque international d'archéologie islamique
Development, architecture, and the formation of heritage in late twentieth-century Iran
André Godard, The Art of Iran
Architectures of transversality
Architectural guide Iran
Colour, light and wonder in Islamic art
Die Ausgrabungen von Samarra
Amurath to Amurath
Alep
Journée d'étude, les 23 et 24 juin 2022
En parallèle de l'exposition, cette journée d'étude internationale rassemblera des spécialistes de l’archéologie et de l’histoire de l’art islamiques.
Cette manifestation bénéficie du soutien du CNRS – Centre de recherche sur le monde iranien (CeRMI, UMR 8041), du musée du Louvre – département des arts de l’Islam, des directions de la recherche et de la valorisation de l’Inalco et de l’université Sorbonne-Nouvelle et de l'Institut français de recherche en Iran (IFRI).
Nos intervenants
Chercheuse post-doctorante associée au Centre de recherches sur le monde iranien (CeRMI – UMR 8041), en charge du programme CollEx « Étude et valorisation du fonds iconographique Henry Viollet », de septembre 2021 à aout 2022.
Chargée de collections pour le domaine persan. Farzaneh Zareie est ingénieur de recherche au CNRS (CeRMI – UMR 8041).
Chargée de recherche au CNRS (CeRMI – UMR 8041)
Experte en instruments et documents scientifiques d’Occident et d’Iran (Compagnie Nationale des Experts)