Kerkennah
La plage est toujours déserte en hiver. Quelques fois, une vieille dame, foulard rouge sur la tête, cherche des coquillages ou des crabes quand la marée est basse.

Crédits photographiques : Jeremy Bezanger (Unsplash)
Marius Dahl
La plage est toujours déserte en hiver. Quelques fois, une vieille dame, foulard rouge sur la tête, cherche des coquillages ou des crabes quand la marée est basse. Marée basse, ce sont des flaques clairsemées entre des monticules gris à perte de vue. Une mer vide d'eau jusque vers l'horizon. D'un mausolée à l’autre, une longue route de sable.
D'un côté, d'innombrables palmiers, le parfum de la roquette sauvage. Petites étoiles jaunes qui scintillent en plein jour. Des succulentes, rouges ou vertes, couleurs changeantes. Ici, elles recouvrent tout, elles survivront à tout. Soudain, deux collines de sel rose, et toujours un désert. L'air pique partout sur la peau.
De l'autre côté de la route, la mer, et souvent une odeur d’égout forte, puissante… bizarrement rassurante. Des felouques bleues enlisées, abandonnées par les pêcheurs. L'une d'elles a des grands yeux peints sur sa coque, et elle me regarde.
Le mausolée a vaincu le vent, il a vaincu le sable, il a vaincu la mer. Il ne tombera pas malgré le ciel en feu. De grands oiseaux, ibis ou flamants, planent loin, comme s'ils fuyaient la fin du monde. Parfois des moutons, des huppes, des chats... pas de chiens. Juste une voiture éventrée sur la route, rongée par le sel.
L'appel du muezzin rythme le jour et revient tard dans la nuit, sur un vieil enregistrement qui grésille. Il faut que le vent souffle pour disperser la complainte dans les moindres recoins de l'île.
Ateliers d'écriture 2020