La chaussure
La chaussure : parfois chaude et sûre, solide, robuste et ferme, d’aucuns diraient pourtant que parfois elle enferme.

Crédits photographiques : Mariéva Chalvin.
Mariéva Chalvin
La chaussure : parfois chaude et sûre, solide, robuste et ferme, d’aucuns diraient pourtant que parfois elle enferme.
Neuve et rigide, elle blesse le pied ; mais elle s’adoucit en vieillissant, lorsque sa peau plissée se fissure de rides semblables à une rivière et ses affluents multiples. Usée, fatiguée, recouverte de poussière ; la salissure de la chaussure est une preuve de bons services, témoignant des kilomètres parcourus et de son labeur passé. Elle nous parle de routes et de champs, d’herbes et de goudron. La poudre sous la semelle, similaire au sel, nous donne le sentiment du sentier. Si souple à présent, mais loin d’être lisse, la chaussure si lasse aux lacets défaits semble baisser les bras. Si son cuir était dur dans sa jeunesse, il n’est plus si dur à cuire : usé par le chemin, on dirait un vieux parchemin...
Défendant héroïquement le pied contre les agressions extérieures, la chaussure le coupe pourtant du monde sensible : elle rend rare l’expérience délicieuse du monde nu sous notre pied également nu et fragile... Cette prison – dorée, mais pas trop – se transforme en sauna dans lequel le pied peu respire, et pire, transpire ; sèche et propre lorsqu’elle sort de la boîte, elle devient moite à l’usure ; la chaude sueur dans la chaussure fermée donne naissance à des parfums fermentés.
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