
L’eau et ses territoires en Himalaya
Conférence du cycle « La fin des frontières ? »
Himalaya (Olivia Aubriot).
L'écoulement naturel de l'eau est soumis à deux types de perturbations : spatiale, en cas de dérivation de l'eau, ou temporelle, en cas de stockage de la ressource.
Pour comprendre les différents usages de l'eau, il convient donc d'étudier les différents espaces de circulation de cette ressource, qui fait fi des frontières administratives. Les processus d'appropriation dont elle fait l'objet par les communautés et les États est l'autre axe d'étude qui intéresse de nombreux chercheurs de ce domaine.
La gestion de l'eau est par ailleurs intimement liée aux enjeux économiques et géopolitiques. En Himalaya, les pays situés en amont, comme la Chine ou le Népal, sont dans une position privilégiée pour s'approprier cette ressource.
Pourtant, au Népal, un territoire traversé par la majorité des affluents du Gange, gouvernement local et populations sont confrontés aux exigences de l'Inde et n'arrivent pas à y faire face.
Après avoir expliciter les « territoires naturels » de l'eau, c'est-à-dire la répartition géographique de l'eau (pluie, neige, glacier, hydrologie) le long de la chaîne himalayenne, Olivia Aubriot présentera les usages anciens de cette ressource en Himalaya et les contraintes qui y sont associées. L'impact des infrastructures modernes, barrages et digues, sur le quotidien des populations locales sera détaillé dans la dernière partie de son intervention, à travers l'exemple du barrage de la Koshi au Népal.
Dans la seconde partie de cette conférence, David Blanchon abordera la situation en Himalaya au regard du droit international de l'eau. Après avoir fait un état des lieux du droit international de l'eau, il détaillera les recherches menées sur les questions de géopolitique de l'eau,en explicitant notamment les notions de puissance hydro-hégémonique, d'hégémonie hydraulique et de « contre-hégémonie ». Ces notions théoriques brièvement exposées seront appliquées au cas du « château d'eau » tibétain et aux relations entre les États voisins.
Bibliographie


The way of water and sprouts of virtue

Barrière épaisse ou ligne imaginaire, la frontière regroupe autant qu'elle disperse peuples et territoires. Les dynamiques impulsées par la mondialisation et Internet tendent à en minimiser l’importance. Mais la résurgence des murs laisse penser que cette notion a encore de...
Nos intervenants

Rattachée au Centre d'Études Himalayennes (CNRS), Olivia Aubriot mène des recherches sur la gestion sociale de l'eau. Travaillant sur les logiques paysannes de gestion de cette ressource collective, elle accorde un intérêt particulier aux techniques et pratiques d'irrigation, à l'imbrication des domaines d'ordre technique et social et à la dimension territoriale de la gestion de l'eau. Son travail de thèse portait sur un système d'irrigation villageois dans les basses montagnes du Népal central. En étudiant les droits à l'eau, elle a étendu ses recherches de terrain à l'Inde du Sud (Tamil Nadu), où elle fut en détachement pour trois ans auprès de l'Université et de l'Institut Français de Pondichéry. Elle travaille actuellement en Himalaya, dans un projet pluridisciplinaire, dénommé PAPRIKA, avec des glaciologues, des hydrologues, des modélisateurs du climat sur les questions d'impacts des changements climatiques sur l'évolution du couvert neigeux et en glace ainsi que sur la disponibilité en eau et l'utilisation de la ressource par les populations. Avec Joëlle Smadja, elle coordonne au sein de ce projet le volet « perception des changements climatiques et impact sur les usages de l'eau ». Elle participe à une étude de terrain dans chacune des quatre grandes unités géographiques du Népal (haute montagne, moyenne montagne, basse montagne et plaine) afin d'étudier les différentes origines de l'eau selon les zones.

Après avoir soutenu un thèse intitulée Enjeux territoriaux et impacts environnementaux des transferts d'eau inter-bassin en Afrique australe en 2003, David Blanchon a été maître de conférences à Bordeaux (2004-2007) puis à l'université de Paris Ouest Nanterre. Il coordonne depuis 2008 l'ANR franco-allemande Water Management in Khartoum International Research Project (WAMAKHAIR) portant sur la gestion de l'eau à Khartoum, en collaboration avec l'université de Bayreuth (Allemagne) et Fribourg (Suisse).