http://www.bulac.fr/node/2735

Quand la littérature rencontre la géographie : une recherche en dialogue

Organisateur(s) :BULAC

Dans la précédente conférence, l'écriture et la traduction étaient entrées en résonance grâce au dialogue fructueux entre Leslie Kaplan et Rosie Pinhas-Delpuech. La troisième conférence du cycle « Littératures en mouvement... » propose un nouveau duo a capella qui permettra de faire dialoguer ensemble la littérature et la géographie.

Quand la littérature rencontre la géographie : une recherche en dialogue

Queensland, Australie (CC01.0).

Quand : 17 décembre 2013 – 18:30 > 20:30 Où : Auditorium du Pôle des langues et civilisations

Le modèle structuraliste qui a prédominé dans les études littéraires depuis les années 1960 a laissé peu de place aux dialogues interdisciplinaires. Parallèlement, la remise en question d’un progrès historique continu a favorisé le développement de la cartographie dans les analyses historiques, et sociologiques des sociétés.

Michel Collot et Christian Grataloup examineront les différentes démarches conduisant à la production d'une « géographie littéraire ».

Face aux études des textes clos sur eux-mêmes, Michel Collot a élaboré une alternative théorique tournée vers la découverte d’une émotion intime de l’écrivain. Dans cette recherche, la géographie tient une large place. En retour, certains géographes trouvent dans la littérature une expression concrète de la relation de l’homme à son milieu. Comme nous le confie Michel Collot : « Le croisement de ces disciplines aboutit à l’émergence d’une "géographie littéraire". » Cette expression recouvre diverses orientations, qu’il convient de distinguer : des approches de type géographique, qui étudient le contexte spatial dans lequel sont produites les œuvres (une géographie de la littérature) ou qui repèrent les référents géographiques auxquels elles renvoient (la géographie dans la littérature) ; des approches de type géocritique, qui analysent les représentations et les significations de l’espace dans les textes eux-mêmes ; des approches de type géopoétique, qui se concentrent sur les rapports entre la création littéraire et l’espace mais aussi sur la façon dont ils sont mis en forme.

Michel Collot présentera les différentes tendances de la géographie littéraire et explicitera sa propre démarche, qui met l’accent sur la notion de paysage.

Christian Grataloup fera écho aux propos de Michel Collot en mettant l'accent sur ce qui a disparu des cartes géographiques depuis la fin des « grands récits », c'est-à-dire depuis la perte de la croyance au progrès historique.

Dans un entretien accordé au magazine Sciences humaines en 2011, Christian Grataloup faisait la remarque suivante : « On parle d’un découpage Nord/Sud (expression initiée dans les années 1980 dans un rapport de Willy Brandt), le Nord désignant les pays riches et le Sud les pays pauvres. On se contente de mettre à plat une représentation spatiale qui est en fait hypersimplificatrice : où placer la Chine, l’Inde dans ce schéma Nord/Sud ? Ce style de modèle gomme toutes les dynamiques, les interactions et la complexité du monde et de l’humanité. En fait, aujourd’hui, la découpe des continents se substitue aux grands récits. » Dans son livre intitulé L’invention des continents, Christian Grataloup s'attache à contextualiser les catégories spatiales que sont les continents. Selon lui, « l' Afrique est une pure construction historique et je me plais à dire que la carte montrant les "empires africains du Moyen Âge" est un triple impérialisme intellectuel puisque le mot  "empire" est d’origine romaine, le "Moyen Âge" est une période européenne et le mot "Afrique" est un découpage européen que se sont ensuite réapproprié les Africains ». Il confie également dans ce blog : « Au fond, ce qui m’intéresse, ce sont les sociétés, dans leurs interactions avec leur milieu environnemental ». Christian Grataloup reviendra dans cette conférence sur ce qui contribue à dissoudre selon lui les clivages entre géographie, histoire, anthropologie, et autres cartes mentales, et sur ce qui permet de faire de la « géohistoire ».

Nos intervenants

Michel Collot
Michel Collot

Michel Collot est professeur émérite de littérature française à l’université Sorbonne Nouvelle et membre de l’Institut universitaire de France. Il a publié de nombreux essais sur le paysage et la poésie : privilégier l'ordre chrono L'Horizon fabuleux (José Corti, 1988), La Poésie moderne et la structure d'horizon (PUF, 1989)La Matière-émotion (PUF, 1997), Paysage et poésie (José Corti, 2005), Le Corps cosmos (La Lettre volée, 2008) et La Pensée-Paysage (Actes Sud, 2011). Michel Collot a également organisé plusieurs colloques interdisciplinaires sur le paysage : Les Enjeux du paysage (1997), Le Paysage état des lieux (2001), Paysage et modernité(s) ( 2007) dont les actes ont été publiés chez Ousia ; Paysages européens et mondialisation (Champ Vallon, 2012). Il dirige actuellement un programme de recherche sur la géographie littéraire et prépare un ouvrage de synthèse sur cette question (à paraître chez José Corti au printemps 2014).

Christian Grataloup
Christian Grataloup

Christian Grataloup est géographique spécialiste de géohistoire, de didactique et de modélisation graphique, il a enseigné jusqu'en 2014 à l'université Paris Diderot.